Chapitre 10
Le trésor maudit

La gorge se rétrécit de plus en plus. Bientôt, elle est réduite à une crevasse où l'on passe tout juste deux de front. Quand, tout à coup, la crevasse s'ouvre sur une cuvette oblongue large de cinquante mètres et encerclée de rochers à pic. Philippe, Monbars et les jeunes y débouchent au pas de course. Ils s'arrêtent aussi sec, faisant des mines phénoménalement ahuries. Partout, la cuvette est couverte de squelettes encore vêtus de lambeaux de tissu pourri et de reliques d'armures. On est ici au plus fort du massacre qui fit périr la troupe de soldats espagnols.

Mais ce n'est pas cette vision sépulcrale qui chavire les sens de Philippe et de Monbars. Non, pas du tout. Non, ce qui les époustoufle est bien plus étonnant : là, au

 

milieu de la cuvette, le soleil du matin fait briller une montagne d'or. Un trésor extravagant, immense, inimaginable. Des dizaines de statues de toutes tailles, des animaux sacrés et des dieux incas, puis des idoles fantastiques, des bijoux fabuleux, des pierres précieuses irréelles, de merveilleux vases d'argent et d'or, et une quantité folle d'or déjà transformé en doublons, d'argent frappé en pièces de huit. Le tout réuni en cercle, comme une chapelle érigée à la cupidité des flibustiers de toutes les époques.

Avant qu'on se soit remis du choc, Évelyne surgit de l'autre côté de la cuvette. Dans sa course, elle dépasse le trésor et se jette dans les bras de Philippe. Les amoureux n'ont pas le temps d'épiloguer sur leurs retrouvailles qu'El Diablo arrive à son tour, suivi du Père Lachaise et de leurs deux derniers compagnons.